Bechalah’ 5777

La ‘’Shirat Hayam’’ est indéniablement l’un des passages les plus marquants de la Thora. Il fait d’ailleurs partie intégrante de la prière quotidienne récitée dans toutes les communautés du monde. Nos maîtres, notamment le Rambam, précisent qu’il est impératif de la lire avant le passage du Shéma. On va donc l’insérer dans la série des Tehilim appelés Psouké Dézimra. La Guémara rapporte dans le traité de shabbat (118b) les propos de Rabbi Yossi qui souhaitait faire partie de ceux qui récitent tous les jours le Hallel. Pourtant, objecte le talmud, il n’est pas recommandé de dire ce passage sans raison valable ? On considère même que dire le Hallel tous les jours ressemblerait à la moquerie comme remercier de façon ironique, voire au blasphème. Nos sages expliquent donc que les paroles de Rabbi Yossi se rapportaient en fait aux Psouké Dézimra.

En effet, les psaumes qui y figurent sont ceux qui commencent par Hallélouy-a, dérivé du mot Hallel. Ce qui différencie ces deux passages, outre les circonstances dans lesquelles le Hallel est récité, c’est le fait que les Psouké Dézimra sont pour le juif l’expression de sa reconnaissance vis-à-vis d’Hashem pour ce dont il bénéficie au quotidien. Le fonctionnement de la nature, les lois dictées à la création du monde qui continuent sans interruption pour rendre la vie possible. Les mécanismes extraordinairement précis qui restent tellement fidèles au projet divin, sont autant de raisons de rendre hommage à notre créateur. Ces phénomènes sont ils pour autant des miracles ou tout simplement une normalité pouvant être considérée עולם כמנהגו נוהג la marche naturel du monde ? C’est précisément dans ce dilemme que la réflexion de Rabbi Yossi trouve son sens. La volonté d’une part de ‘’garder’’ dans le Hallel son caractère exceptionnel. Le réserver à certaines circonstances afin de réaliser lors d’événements précis la bonté manifeste d’Hashem. Mais il craint par ailleurs de banaliser ce qui peut paraître ordinaire au jour le jour. Son désir était en fait d’être capable de réaliser sans cesse du ‘’miracle-normal’’ !

Au moment où les béné Israël se trouvent acculés devant la Mer Rouge, Moshé se met à prier. Hashem lui répond ’’pourquoi pries tu ? Parle aux enfants d’Israël et qu’ils avancent !’’. Il lui indique alors l’existence de ce concept selon lequel le miracle peut être considéré comme normal. ‘’Il n’y a qu’à avancer’’. Traverser la mer à pied : inconscience ou confiance totale ? Affronter tous les jours de la vie les épreuves et envisager l’improbable, procède de cette même interrogation. Puis compter sur le miracle, ou peut être s’agit il de la vocation des phénomènes orchestrés par Hashem. L’ouverture de la mer est à l’évidence un Ness pour tous les hommes. Pour Hashem c’est ‘’normal’’. En disant à Moshé d’avancer simplement, il nous apprend à reconsidérer la nature pour mieux apprécier son rôle à notre égard. La notion de Hallélouy-a est née. Réciter au quotidien la Shirat Hayam au moment des Psouké Dézimra, nous aide à réaliser de la bonté de D… en nous encourageant à envisager le ‘’miracle-normal’’. Il s’agit à la fois de courage et de clairvoyance, en un mot : la confiance en Hashem.

Shabbat shalom

Rav Yakov SITRUK

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