Emor 5777

C’est l’été !

Il n’y a dans la tradition que deux vraies saisons : l’hiver tout au long duquel on demande la pluie dans nos prières, et l’été lorsque l’on mentionne les bienfaits de la rosée. Dans le Traité de Rosh Hashana (10.) Rabbi Eliezer et Rabbi Yéoshoua discutent, pour savoir si le monde a été créé en Tichri ou en Nissan. Selon Rabbi Eliezer, le monde démarre au début de l’hiver alors que Rabbi Yéoshoua affirme que c’est en été que cela se passait. Cette question nous invite à réfléchir au sens du rythme de la nature et au rôle des saisons. Pendant l’hiver la nature reçoit. Elle absorbe les pluies en donnant le sentiment de s’endormir. Elle ne produit pas mais elle se prépare. Bientôt l’été viendra et l’on pourra constater que tout ce qui est dorénavant possible n’est en fait que le résultat de cette préparation. L’hiver contient les causes des effets produits par l’été.

La discussion de ces deux Maîtres se résume donc à la question de savoir si les causes et les effets répondent à un chronologique défini par avance, ou si la relation de l’un à l’autre peut s’inverser. Ces mêmes H’ah’amim s’opposent d’ailleurs dans la Guémara de Sanhedrin (97:) afin de définir si la Guéoula ne peut intervenir qu’après la Téshouva du peuple juif, ou si les deux sont indépendants. Ils comptent tous les deux parmi les élèves des célèbres Hillel et Shamaï.

Nous observons alors que ces deux géants s’opposaient déjà à travers un débat autour de la création du monde. Beth Shamaï disait : le ciel a été créé d’abord puis la terre ensuite. Beth Hillel disait la terre est antérieure au ciel. Chacun des deux antagonistes appuiera son propos d’une preuve explicite dans les versets de la Torah. L’idée de base commune à ces différentes polémiques se trouve être précisément l’interrogation relative à l’ordre des choses, à leur classement. Dans le système permettant au monde de fonctionner, Hashem a-t-il imposé un ordre et une chronologie à respecter ? Peut être l’homme a-t-il le pouvoir de changer les choses ? D’abord la cause puis l’effet ensuite ?

Et si l’on pouvait recevoir et mériter après ? Peut-on demander à HaShem en s’engageant à mériter plus tard ?

Le ciel contient la raison de ce qui se passe sur la terre. L’hiver représente la cause de tout ce que l’été apportera. La Téshouva expliquerait la Guéoula. Alors Beth Shamaï et ses élèves sont catégoriques. La cause puis l’effet !

Beth Hillel, souvent plus déférent et moins tranchant enseigne que le monde peut fonctionner différemment. Que l’homme peut tout demander à HaShem. Et qu’il a toutes les chances d’être exhaussé. Il nous apprend que la confiance ne doit pas être une conséquence, mais qu’elle peut être justifiée a posteriori. En effet, il nous arrive de devoir accorder notre confiance. Imaginons des parents à l’égard de leur enfant. Il faut d’un côté apprendre à nos enfants à mériter, à être digne de cette confiance. Mais de l’autre côté, la leur donner, va les aider à se construire. On a tous besoin de savoir que les autres nous font confiance. On prendra alors la décision, quelques fois risquée, de faire comme si on savait qu’ils allaient la mériter. En leur donnant cette force, on va surement leur donner les moyens de nous prouver et de se prouver qu’ils en sont capables.

C’est cette position qu’HaShem a choisi d’adopter vis-à-vis de l’homme selon Beth Hillel et ses élèves. C’est la promesse et l’espoir que l’été nous apporte en échange d’un engagement véritable à mériter tout ce que l’on reçoit.

Shabbat shalom

Rav Yakov Sitruk

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