Ki Tavo 5778

Deux ans. Difficile de savoir si le temps est vite passé ou si c’est une éternité.

Qu’il me soit permis de dédier ces quelques lignes à ce père que nous avons partagé avec tant de personnes qu’il a guidé, marqué et aimé. Quand on a tellement reçu de la part d’une personne, il serait injuste de dire que son départ laisse un vide. Evidemment, le manque est immense, mais son enseignement et son exemple sont tous les jours un peu plus vivants. Chaque circonstance, chaque ligne que nous continuons d’étudier ou d’enseigner, nous permettent de réaliser que dans tous les recoins de la vie il a laissé son empreinte et son message. En poursuivant ce qu’il nous a appris, on a la conviction de prolonger son existence. Un Rav vît pour l’éternité grâce à tous ceux qui incarnent ce qu’il exprimait.

Lors d’un de ses fameux shiourim, qu’il donnait un soir à la synagogue de la Victoire, il expliquait le lien qui l’unissait à ses élèves. Il disait qu’aimer quelqu’un, c’est être présent même pendant une absence. Une relation est faite de séparations et de retrouvailles. ‘’Le problème n’est pas le temps qui séparent les retrouvailles, mais le sens que l’on est capable de leurs donner. Comprendre son maître, c’est savoir interpréter ses silences’’.

La vie nous apprend que l’on ne peut pas être en permanence dans la proximité géographique de ceux que l’on aime. L’intensité de l’échange n’est pas condamnée à en souffrir. Cette distance représente une autre dimension dans les sentiments que l’on éprouve à leur égard. Les parents comme les maîtres donnent à leurs enfants et leurs élèves, ce dont ils auront besoin plus tard. Lorsqu’ils sont ensembles, les enfants n’ont besoin de rien, les parents veillent. Les élèves ne risquent pas de commettre d’erreur, le Rav est vigilant. Après, c’est une autre histoire. Celle de la réalité qui commence vraiment.

Durant toute sa vie de rav, il avait le souci de propulser ses élèves vers d’autres horizons. De les pousser à poursuivre le chemin qu’ils avaient eu le bonheur de démarrer avec, et souvent grâce, à lui. Il rappelait régulièrement, que son objectif n’était pas que l’on s’attache « trop » à ses cours, mais de donner envie d’en suivre d’autres. ‘’Notre fierté n’est pas de compter nos élèves, mais de compter ceux des autres en sachant qu’un jour ils étaient aussi là’’.

Il me semble que ces quelques phrases incarnent le programme du guide que mon père a était. Pour ma part, ces mots résonnent comme un message qui traversera le temps. A présent, ne pouvant ni l’entendre ni lui parler, ces paroles sont une véritable consolation. Elles sont comme le conseil qu’on a tellement besoin d’entendre. Je ne le remercierais jamais assez d’avoir dit suffisamment tôt ce que j’aurais besoin d’entendre plus tard.

Il disait un autre jour que les fêtes de Tichri sont une magnifique chance de faire le point. Elles nous permettent de ne pas vivre nos vies comme un déroulé que l’on subit ou auquel on s’adapte. Elles nous renvoient par la réflexion à laquelle nous sommes tenus, notre image la plus fidèle.

Alors, à la veille de ces moments exceptionnels, qu’il vivait avec tellement de ferveur, je voudrais souhaiter à ceux qui lui étaient proches, d’être capables de perpétuer ce qu’il a été. Un homme qui pensait ce qu’il disait et qui était ce qu’il enseigner. Nous lui exprimerons notre reconnaissance en suivant l’extraordinaire exemple qu’il était.

Notre père et notre maître, le rav Yossef H’aïm Sitruk zih’rono tsadik vékadosh livrah’a !

Rav Yakov Sitruk

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